Un manque de sensibilisation dans la lutte contre les agressions sexuelles

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Des milliers d’enquêtes criminelles à caractère sexuel seront rouvertes dans la province pour s’assurer que les policiers ont bien suivi les procédures avant de clore leurs dossiers.

D’entrée de jeu, l’Action ontarienne contre la violence faite aux femmes souligne que les statistiques du quotidien torontois n’ont rien de surprenant. Elle explique que les taux de plaintes jugées infondées en matière d’agressions sexuelles renforcent le mythe selon lequel les femmes mentent sur le fait d’avoir été agressées ou violées.

Selon l’AOCVF, ces statistiques identifient plusieurs failles dans le processus des plaintes à la police et leur traitement. Elles semblent, en outre, montrer que les autorités accordent peu de crédibilité aux plaignantes. Les chiffres révèlent aussi le manque d’éducation et de sensibilisation dans la communauté en matière de violence faite aux femmes.

La directrice générale de l’association, Maïra Martin, estime par ailleurs qu’« il est anormal qu’un cas d’agression sexuelle ne soit pas rapporté de la même façon par la police que vous soyez à Ottawa, à Sarnia ou à Timmins ».

Mme Martin pense qu’il est indispensable d’uniformiser toutes les pratiques d’enquête policière au pays ou à tout le moins dans chaque province.

L’association rappelle aussi que ces statistiques sont d’autant plus désolantes que la très grande majorité des cas d’agression contre les femmes ne sont jamais rapportés aux policiers. « Une femme sur 20, selon les dernières statistiques, portera plainte après une agression sexuelle », poursuit Mme Martin.

« La peur du système criminel, la peur d’être jugées, blâmées ou d’être culpabilisées et victimisées à nouveau durant tout le processus judiciaire effraient les femmes. » – Maïra Martin, directrice générale de l’Action ontarienne contre la violence faite aux femmes

Recommandations de l’AOCVF :

  • la création de comités composés de policiers et d’organismes communautaires pour réévaluer les cas d’agressions jugés infondés ;
  • la mise sur pied d’une formation continue pour les policiers afin qu’ils adaptent leurs techniques d’entrevue et qu’ils prennent en compte spécifiquement les cas d’agression à caractère sexuel ;
  • l’établissement d’une formation spécifique aux agents pour qu’ils évitent de victimiser à nouveau les femmes ;
  • l’élaboration d’un protocole en partenariat avec tous les secteurs (santé, justice, sécurité publique et organismes communautaires) pour uniformiser la réponse des autorités dans les cas de dénonciation d’agression sexuelle

Mme Martin conclut que le fait qu’un dossier soit clos au poste de police après une plainte ou qu’un procès se termine par l’acquittement d’un suspect ne remettra jamais en cause le fait que l’agression a bien eu lieu. Elle rappelle que le fardeau de la preuve contre un agresseur présumé est très élevé et que les procureurs doivent prouver sa culpabilité au-delà de tout doute raisonnable, ce qui est très difficile selon elle, en particulier en l’absence de preuves solides.

Réaction du gouvernement Wynne

Dans un communiqué, la ministre de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels de l’Ontario, Marie-France Lalonde, affirme que le harcèlement et la violence sexuelle n’ont aucune place dans notre société.

Elle précise que son gouvernement a lancé en 2015 un plan d’action pour soutenir les victimes d’agressions et pour sensibiliser le public à ce problème dans le but de changer les attitudes du public vis-à-vis de ce phénomène.

La ministre ajoute qu’elle soutient l’initiative de son collègue fédéral, Ralph Goodale, qui a appelé les corps de police au Canada à se pencher sur la façon dont ils ont mené des enquêtes criminelles dans leur localité. « Je demande aux corps de police de la province d’en faire autant et de partager les conclusions de leur enquête interne avec mon ministère », écrit-elle en saluant ceux qui avaient déjà pris l’initiative de le faire.

Paru dans Ici.Radio-canada.ca

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