Les enjeux sont énormes ; nous n’avons pas droit à l’erreur.
Un locataire sur cinq dépense la moitié de son revenu pour se loger. Au Canada, un million et demi de familles ne peuvent pas trouver un logement convenable selon leur budget. À Montréal seulement, 25 000 foyers sont en attente d’un logement social. Les listes d’attente pour des logements sociaux s’allongent dans la plupart de nos villes et un trop grand nombre de locataires craignent que leur logement ne soit condamné, parce qu’il n’y a pas assez de fonds pour faire les réparations.
Le sort de 38 000 logements sociaux à Montréal, des HLM, des coopératives ou des OBNL, est incertain car leurs ententes de financement avec le gouvernement fédéral arrivent à échéance.
Il faut se rendre à l’évidence : les logements sont devenus moins abordables. Plus du tiers des locataires québécois paient plus de 30 % de leur revenu familial pour se loger. Les maires du Québec et du reste du pays sont témoins des ravages de cette crise, les parents tiraillés d’avoir à choisir entre payer le loyer ou nourrir leurs enfants. Nous voyons des entreprises stagner parce qu’elles ont de la difficulté à recruter de la main-d’œuvre talentueuse. C’est clair : nous ne pourrons pas bâtir les villes agréables et concurrentielles que nos citoyens méritent tant que cette crise durera.
Le gouvernement fédéral nous a consultés et il nous a écoutés. Même la promesse d’une Stratégie nationale sur le logement représentait tout un revirement pour les villes et les défenseurs du logement ; on en réclamait une depuis des années. Et lorsque le budget a prévu 15 milliards pour financer cette stratégie, nous y avons vu une réponse directe aux recommandations de la Fédération canadienne des municipalités (FCM).
Mais ce n’est pas encore le temps de crier victoire, car l’étape de la mise en œuvre est cruciale et elle doit être sans faille. C’est pourquoi le caucus des maires des grandes villes de la FCM a proposé des pistes de réflexion afin de faire de la future stratégie un succès.
Il faut financer la réparation des logements sociaux pour que personne ne perde son logement, ces logements rénovés formeront le fondement du parc de logements abordables de demain. Il faut aussi élargir ce parc de logements en construisant des logements sociaux et communautaires.
Le fédéral travaille maintenant à la mise au point de sa stratégie, un parcours parsemé d’embûches qu’il doit absolument éviter.
Pensons-y : si les réparations ne sont pas faites, de plus en plus de logements deviendront dangereux et devront être condamnés. Sans subvention au loyer, les ménages à faibles revenus seront confrontés à des hausses de loyer insoutenables.
Renouveler les logements sociaux existants n’a rien de nouveau ou de particulièrement attrayant, mais c’est le moyen le plus rentable et logique de préparer le parc de logements de demain.
Un piège dont le gouvernement doit se méfier est d’opter pour des solutions trop faciles. Le succès à long terme de la Stratégie nationale sur le logement dépendra de l’équilibre entre ses différents éléments. Par exemple, le caucus des maires des grandes villes a proposé une allocation directe au logement, une approche novatrice qui fournirait immédiatement une aide bien nécessaire aux familles à faibles revenus. Cette aide financière pourrait être utile, mais elle serait insuffisante si ces ménages n’ont pas encore accès à des logements abordables. Et elle pourrait même nuire si elle était adoptée au détriment des priorités fondamentales de réparation et de construction. Toute mesure doit s’inscrire dans une stratégie d’abord axée sur l’offre.
L’occasion qui s’offre au gouvernement fédéral de s’attaquer à la crise du logement ne reviendra pas. Il doit voir à ce que chaque dollar investi procure le meilleur rendement possible. La Stratégie nationale sur le logement fixera les paramètres et donnera le ton de l’approche fédérale en matière de logement pour les années à venir. Elle devra donc être sans faille.
Lettre ouverte de Don Iveson, maire d’Edmonton et président du caucus des maires des grandes villes de la Fédération canadienne des municipalités . (Les villes de Montréal, Québec, Laval, Gatineau et Longueuil font notamment partie des grandes villes de la Fédération canadienne des municipalités.)
Source : La Presse +