Itinérance – plus d’argent, mais pas de plan

spli

L’annonce d’un financement de 17 millions de dollars supplémentaires pour les deux prochaines années a reçu un accueil partagé, lundi, de la part de certains organismes de lutte contre l’itinérance, qui se sont réjouis de l’octroi de sommes supplémentaires, mais également désolés de l’absence d’un plan plus concerté.

Les fonds accordés par le gouvernement fédéral doivent servir à bonifier la Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance (SPLI), qui est une initiative provinciale. Ils s’ajoutent aux 19,6 millions que reçoit annuellement Québec pour cette stratégie.

« Comment vont se décliner les sommes ? Bien, dans un premier temps, vous savez qu’il y a des plans communautaires qui ont été développés dans tous les CISSS et CIUSSS du Québec. Il est évident que chacune des régions a ses réalités », a commencé la ministre déléguée à la Santé publique, Lucie Charlebois, quand on lui a demandé de donner des exemples d’utilisation des sommes octroyées à Québec. « À partir des plans communautaires qui ont été développés, les gens des CISSS et CIUSSS vont voir s’il y a des projets qui méritent d’être bonifiés d’abord. »

Puis, des projets ayant été refusés lors de premières demandes de financement pourraient être lancés, a ajouté la ministre.

 Un long processus

En termes concrets, cela signifie que diverses organisations communautaires devront se soumettre à un nouveau processus de demande de subvention — une démarche qui occupe les employés de certains organismes pendant des mois, chaque année. « C’est notre grand rêve d’avoir du financement pluriannuel, et on parle d’ententes de plus de trois ans. Ce serait essentiel », a réagi Philippe Meilleur, du centre de services Montréal autochtone. Selon lui, le temps passé à remplir des demandes de subventions nuit à la qualité des services dispensés. « Une grande quantité de temps qu’on pourrait passer à innover dans nos services, à créer des partenariats qui seraient mieux construits, des corridors de services avec les institutions, est passée à rendre des comptes à des gouvernements sur de l’argent qui nous appartient. »

Adrienne Campbell, directrice du refuge Projets autochtones du Québec (PAQ), où a eu lieu l’annonce, a cependant ajouté que les organismes communautaires « sont habitués à gérer des projets de manière ponctuelle et de toujours refaire des demandes [de subventions], chaque année ».

« Dans le communautaire, c’est ce qui demande le plus de temps aux directeurs, a-t-elle avancé. Est-ce que c’est l’idéal ? C’est sûr que non. Mais ça fait longtemps qu’on travaille dans ces situations-là. »

 Encore plus de critères

Montréal autochtone et PAQ ne se sont pas moins réjouis du financement d’Ottawa. De son côté, le Réseau solidarité itinérance du Québec s’est félicité d’une annonce témoignant à son avis d’« efforts coordonnés » entre les gouvernements provincial et fédéral. Le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal a pour sa part applaudi à l’« approche globale du programme SPLI ».

Mais il reste que les organismes communautaires auront à répondre à une nouvelle série de critères pour diriger leurs interventions et obtenir du financement, a souligné Philippe Meilleur. Chez les autochtones, qui représentent une certaine proportion de la population itinérante, les Centres d’amitié ont déjà travaillé, de concert avec Ottawa, sur la Stratégie pour les autochtones vivant en milieu urbain (SAMU). « Donc on va avoir des critères d’un bord pour la SAMU, des critères de l’autre bord pour la SPLI, des critères dans différents ministères… », a résumé M. Meilleur. « [Si les gouvernements pouvaient] arrimer tous les critères d’intervention et les besoins, ça serait peut-être quelque chose qui nous aiderait », a-t-il suggéré.

Article paru dans le Devoir

crédits photo: Jacques Nadeau