Égalité hommes-femmes: La CSQ dénonce le «double discours» du gouvernement

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Rien n’a changé depuis le rapport publié par l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) en 2015. Celui-ci concluait que, en ce qui a trait aux mesures d’austérité, les femmes sont doublement perdantes. « Nous pouvons dire que, même si on fait des avancées depuis des années, les reculs se font plus vite et sont plus significatifs », déplore la présidente de la CSQ, Louise Chabot. Elle ajoute que les politiques du gouvernement actuel sont discriminatoires envers les femmes, dans l’emploi, mais aussi d’un point de vue économique et social.

 La Journée internationale des femmes constitue, cette année encore, une occasion de rappeler l’importance de l’analyse différenciée selon les sexes (ADS). Pour Mme Chabot, si le gouvernement prenait en compte l’ADS pour chaque projet de loi, il se rendrait compte que de nombreuses politiques publiques et économiques désavantagent largement les femmes. « Nous sommes bien déçues, extrêmement déçues même, et le mot est faible, lance-t-elle. Après toutes ces années, même si l’ADS est un principe inscrit dans la politique d’égalité entre hommes et femmes, on voit que le gouvernement actuel n’en tient pas compte. » La déception est d’autant plus grande que les syndicats se sont largement battus pour que cette mesure soit mise en place.

 Un service public en péril

 « Le service public ne semble pas être la priorité du gouvernement, ni le dénominateur commun, constate Mme Chabot. Au contraire, on a senti de sa part une forme de démolition des services publics, dans tous les domaines. » Alors que les femmes représentent une forte proportion de la main-d’oeuvre dans le secteur public, elle regrette que les investissements en santé, éducation et dans la petite enfance soient encore considérés comme une dépense. Au contraire, ils devraient être envisagés comme de réels investissements, autant en matière d’emplois que d’égalité. « Les gouvernements décident d’investir plus massivement dans les infrastructures et de faire des compressions dans les grands secteurs des politiques sociales », se désole-t-elle.

 À son avis, le domaine de la petite enfance est le plus criant. « On est en train de priver les enfants et leurs parents d’un service public de qualité, parce qu’on mise beaucoup plus sur des services de garde privés que sur des services éducatifs à la petite enfance, et on pénalise une majorité d’emplois féminins, renchérit la présidente de la CSQ. Cela fait en sorte de privilégier le privé dans une politique familiale qu’on s’était donnée il y a 20 ans. » Ainsi, enfants et parents paient le prix de ses restrictions budgétaires. La politique familiale du Québec, qui, Mme Chabot le rappelle, a été une mesure permettant aux femmes de se retrouver massivement sur le marché du travail.

 « Au Québec, contrairement aux autres provinces, de plus en plus de femmes travaillent grâce à ces politiques familiales et, pourtant, le gouvernement est en train de les sabrer », ajoute-t-elle. Alors que le premier ministre affirme régulièrement faire de l’éducation sa priorité, « les bottines ne suivent pas les babines », du point de vue de la CSQ. « On ne peut pas en même temps parler d’une politique nationale d’éducation publique et sabrer les services à la petite enfance, tranche-t-elle. Il y a un double discours, il y a quelque chose qui ne marche pas. »

 Le domaine de la santé et des services sociaux est aussi très touché par les politiques d’austérité. Mentionnant, entre autres, les fortes restrictions budgétaires, la centralisation des établissements de santé, le manque d’accessibilité des soins et la centralisation des laboratoires, Mme Chabot estime que « les politiques du ministre Barrette nous mènent droit devant la privatisation des services, en vue de diminuer le rôle de l’État dans une grande mission comme la santé ».

 En attente du budget Leitão

 À l’approche de l’annonce du prochain budget, la CSQ souhaite rappeler l’importance du service public, réaffirmant que celui-ci fait partie de la solution. Entendue dans le cadre des consultations prébudgétaires, la principale recommandation formulée par la CSQ est l’investissement massif dans les services publics et les programmes sociaux. « En plus de contribuer à l’économie, cela permettrait de continuer à réduire les inégalités sociales, mais surtout les inégalités entre hommes et femmes », souligne Mme Chabot.

 De la même façon que l’avait dénoncé la protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain, dans son dernier rapport, la CSQ déplore que le gouvernement ait abandonné les citoyens. « Comme l’a dit haut et fort Mme Saint-Germain, il y a des dénis de services dans plusieurs domaines », croit Mme Chabot. Lors des consultations, la CSQ a dénoncé la diminution des services, mais aussi la pénibilité au travail. « Nous avons apporté des exemples pour montrer que, derrière les mots qu’on dit, il y a des cas concrets », précise-t-elle.

 Égalité sans limites

 Cette année, le Collectif 8 mars — dont est membre la CSQ — a choisi pour thème « L’égalité sans limites ». « L’égalité devrait être transcendante dans tous les domaines, je pense que c’est une question de respect, déclare Mme Chabot. Les femmes représentent la moitié de la population et, même si de grands pas ont été faits, on constate que l’égalité de faits n’est toujours pas atteinte, tant au niveau des responsabilités familiales, qui sont encore le lot des femmes, qu’en ce qui concerne la violence, l’écart de salaire entre hommes et femmes ou encore la précarité et pauvreté qui se retrouvent surtout du côté des femmes. » Pour Mme Chabot, cette journée et ce thème soulignent encore une fois l’importance de la solidarité et de la bataille, mais, surtout, de la conscience sociale qu’aucun écart entre les sexes ne devrait être accepté, et cela, sur tous les plans.

Paru sur le Devoir

crédits photo: Annik MH de Carufel Le Devoir