Appel à lever les obstacles à la lutte contre l’itinérance

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En entrevue à Radio-Canada, le coordonnateur du RAPSIM, Pierre Gaudreault, a admis que la mise en place d’un plan de lutte contre l’itinérance a permis « une meilleure mobilisation des différents ministères à la grandeur du Québec pour développer des services ».

Il s’inquiète toutefois de l’adoption par le gouvernement Couillard du projet de loi 70 qui prévoit d’importantes pénalités financières aux premiers demandeurs d’aide sociale jugés aptes au travail.

En vertu de cette nouvelle réglementation, le chèque mensuel de base de ces prestataires passera de 623 $ à 399 $.

 » Il doit y avoir des programmes d’insertion sociale qui favorisent l’implication, le bénévolat et dans certains cas, le retour au travail parce qu’il y en a qui sont capables. L’approche punitive du gouvernement, on l’a décriée comme les partis de l’opposition, comme bien des acteurs.  » –  Pierre Gaudreault, coordonnateur du RAPSIM

« Un montant aussi dérisoire augmente les voies d’entrée en itinérance et réduit les voies de sortie », soutient pour sa part Micheline Cyr, directrice de l’Auberge Madeleine qui vient en aide aux femmes en situation d’itinérance. Elle soutient que l’accès à un revenu minimal est indispensable pour favoriser la stabilité en logement.

À quelques semaines du dépôt du prochain budget, le RAPSIM interpelle le gouvernement pour qu’il revienne sur sa décision. « Il n’y a pas de mal à reconnaître qu’on a eu tort », souligne Pierre Gaudreault.

Plus de logements sociaux

Pour le RAPSIM, la lutte à la pauvreté passe aussi par des mesures structurelles, comme l’investissement dans le logement social et une fiscalité qui permet une meilleure redistribution des richesses.

Après l’adoption d’une politique d’itinérance, le nombre d’unités de logements sociaux est passé de 3000 à 1500 unités en développement par année dans la province de 2014 à 2015 pour toutes les populations (personnes âgées, familles, etc.)

« Il faut réinvestir davantage dans l’économie, le bien commun, la santé des gens et dans le développement du logement pour prévenir et réduire l’itinérance », affirme Pierre Gaudreault.

Paru sur Ici.radio-canada.ca

crédits photo: Radio-Canada 

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Ce matin, devant une cinquantaine de personnes, le RAPSIM a tenu une conférence de presse au Le PAS de la rue, afin de souligner le 3ème anniversaire de la Politique nationale de lutte à l’itinérance. Nous avons mis de l’avant l’importance des actions de lutte à la pauvreté qui font largement défaut dans le déploiement de la Politique depuis son adoption en février 2014. Les députées Diane Lamarre et Manon Massé étaient présentes pour appuyer le message du RAPSIM.

La Politique affirme que « si l’itinérance n’est pas seulement un problème de pauvreté, elle est toujours un problème de pauvreté. » Elle l’identifie ainsi comme l’un des facteurs à l’origine de l’itinérance et réaffirme l’importance d’y apporter des réponses. Or, l’action gouvernementale des dernières années a plutôt favorisé un appauvrissement croissant d’une partie de la population, que l’on pense à la récente réforme de l’aide sociale ou au manque flagrant de programmes d’insertion.

DES REVENUS INSUFFISANTS

Nombre de personnes en situation d’itinérance ou à risque de l’être vivent de l’aide sociale. Or, le montant de la prestation de base ne permet pas de subvenir aux besoins essentiels, soit de se loger, se nourrir et se vêtir. « Un montant de 628$ par mois n’est pas suffisant, ni pour éviter la rue, ni pour s’en sortir, » a souligné Pierre Gaudreau, coordonnateur du RAPSIM. Il rappelle par ailleurs que la Politique en itinérance pose le droit à un revenu décent pour toutes et tous.

À ce montant insuffisant s’ajoute l’impossibilité pour les personnes à l’aide sociale d’avoir des revenus du travail supérieurs à 200$, montant au-deçà duquel leur chèque est coupé. Cette situation n’encourage pas les personnes qui le peuvent à se remettre en activité, les emplois accessibles étant rarement à temps plein et très faiblement rémunérés.

La réforme à l’aide sociale, adoptée à l’automne 2016, annonce par ailleurs un montant de base encore plus réduit pour les personnes qui en feront une première demande. Micheline Cyr, directrice de l’Auberge Madeleine, ressource d’hébergement pour femmes, a dénoncé les impacts anticipés de cette loi : « Avec les pénalités financières imposées aux personnes ne répondant pas aux exigences du Programme Objectif Emploi, le montant du chèque pourrait être coupé à 399$ par mois. Un montant aussi dérisoire augmente les voies d’entrée en itinérance et réduit les voies de sortie. » Elle affirme que l’accès à un revenu minimal est indispensable pour favoriser la stabilité en logement.

LE MANQUE DE PROGRAMMES D’INSERTION ADAPTÉS

Les programmes de réinsertion sociale ont subi des coupures importantes dans les dernières années, au profit de programmes axés sur l’employabilité. C’est le cas du Programme d’aide et d’accompagnement social (PAAS-Action), dont les critères de participation ont été modifiés. Avant ce changement, il était un des seuls programmes à répondre aux besoins des personnes éloignées de l’emploi, dont plusieurs en situation d’itinérance ou à risque de l’être. Selon Nathalie Bergeron, responsable de l’intervention psychosociale au Sac à dos : « Plusieurs personnes itinérantes n’ont pas la capacité de retourner vers l’emploi à temps plein. Pour beaucoup, l’implication communautaire, le bénévolat ou le travail à la journée sont les seules formes de participation sociale qui correspondent à leur situation ».

Depuis plus d’un an, le RAPSIM demande des actions majeures contre la pauvreté, ayant rencontré le Ministre François Blais à deux reprises. « Le prochain budget sera un moment décisif pour réinscrire la lutte à la pauvreté dans l’action gouvernementale. Québec doit prendre des engagements clairs en vue du 3ème Plan de lutte à la pauvreté, dont la sortie est prévue au printemps, » d’affirmer Pierre Gaudreau. Pour le RAPSIM, la lutte à la pauvreté passe par des actions favorisant l’accès à un revenu décent pour toutes et tous, mais aussi par des mesures structurelles, comme l’investissement dans le logement social et une fiscalité permettant une meilleure redistribution des richesses.

Texte issu du Facebook du RAPSIM