Alerte Amber: la camionnette retrouvée, aucune trace de Louka

louka

Le véhicule a été retrouvé par les policiers abandonné dans une halte routière à l’angle des routes 329 et 148 vers 2 h du matin. Des maîtres chiens ont été déployés dans les alentours pour tenter de retrouver la trace des occupants. L’hélicoptère de la SQ ainsi que le Groupe tactique d’intervention ont aidé à passer les environs au peigne fin. La SQ demande aux citoyens de redoubler de vigilance quant à la description physique du père et de l’enfant, car on ignore maintenant leur mode de déplacement.

L’alerte Amber avait été déclenchée hier lorsqu’Ugo Fredette, un homme fasciné depuis des années par les histoires de femmes et d’enfant disparus ainsi que les crimes non-résolus, a enlevé l’enfant.

Selon nos informations, c’est un voisin qui aurait appelé la police peu après 17 h 30. Véronique Barbe, gestionnaire d’une garderie et mère de trois garçons et d’une fille, a été découverte inanimée, poignardée à mort dans sa maison du boulevard Antoine-Séguin.

Les policiers refusaient de le confirmer hier soir, mais selon nos sources, les enquêteurs ont immédiatement relié le crime à son conjoint, Ugo Fredette. Âgé de 41 ans, il est le père du plus jeune enfant de la victime, le petit Louka, âgé de 6 ans. L’homme a pris la fuite dans une camionnette Ford F-250 en emmenant l’enfant. Une caméra de surveillance les a captés ensemble peu après dans le magasin Walmart de Saint-Eustache.

Les trois autres enfants de la victime n’étaient pas sur place au moment du crime.

La Sûreté du Québec a déclenché une alerte AMBER et les corps de police de toute la région se sont lancés à la recherche du père, pendant que des dizaines de personnes lui envoyaient des messages sur les réseaux sociaux l’exhortant à se rendre.

Au moment de publier ces lignes, le père et l’enfant n’avaient toujours pas été retrouvés.

«Je pense qu’il aimait beaucoup son enfant»

Henri Provencher, grand-père de Cédrika Provencher, a « un peu » connu Ugo Fredette, dans le cadre de la réalisation d’un documentaire sur la disparition de sa petite-fille. Il s’est directement adressé à lui sur Facebook en soirée.

« Message à Ugo, Te connaissant, je fais appel à ton coeur de père, ne commet pas l’irrémédiable, remet ton enfant aux policiers sans plus tarder, pour qu’il soit en toute sécurité. Merci d’agir en père responsable Ugo. Pense à ton enfant. 

« Je demande à tous ses contacts de lui faire parvenir ce message, en espérant qu’il le reçoive Un enfant n’a pas de prix. Merci de Partagez et partagez encore. SVP. »

Joint par La Presse, M. Provencher a expliqué qu’il tenait à lui demander de « ramener son enfant aux policiers, en s’adressant à son coeur de père ».

« Je pense qu’il aimait beaucoup son enfant, et la meilleure façon de le protéger, c’est de le rendre aux policiers, selon moi », a indiqué M. Provencher qui dit n’avoir « eu aucune nouvelle de lui depuis un très bon bout de temps ».

« Il en parlait [de son enfant] quand j’assistais à leurs séquences […] Je veux tout simplement le ramener à la réalité et lui dire qu’un enfant ne doit pas subir les oeuvres des parents », a indiqué M. Provencher.

« Quand les parents s’entendent ou ne s’entendent pas, ça n’est pas l’affaire des enfants. […] Si lui, il a des choses à affronter comme adulte, ça le regarde lui, et pas son enfant, tout simplement. »

Ugo Fredette collaborait à un documentaire sur le cas de Cédrika Provencher avec le réalisateur Stéphan Parent. Le projet, qui avait au départ reçu l’approbation de la famille, devait initialement servir à retrouver l’enfant disparue il y a 10 ans à Trois-Rivières, mais il aurait évolué après la découverte des ossements de Cédrika en 2015.

Henri Provencher a confirmé que la famille avait « décidé qu’il [le documentaire] ne devait pas avoir lieu, tout simplement », sans vouloir préciser pourquoi. « Je ne veux pas mélanger les choses ce soir », a-t-il indiqué.

«Pas toujours facile»

Ugo Fredette avait participé à plusieurs autres projets visant à faire connaître la peine des familles ayant perdu un proche en raison de crimes sordides non résolus. Sur l’internet, il demandait aux gens de lui envoyer des informations pour contribuer à faire avancer certaines enquêtes ou de les envoyer à l’avocat et ex-ministre de la Justice Marc Bellemare. Ancien employé d’une entreprise d’outillage de Laval, il avait été congédié en 2007 pour avoir « colporté diverses informations mensongères et diffamatoires », selon un jugement de la Commission des normes du travail.

Sa conjointe, avec qui il avait emménagé à cette adresse en 2010, participait à certaines de ses activités reliées aux disparitions de femmes et d’enfants, comme le montrent certaines de ses publications sur Facebook. Sous une photo de couple, le 20 août, il avait parlé de l’état de leur relation : « Ce n’est pas toujours facile, mais on fait de notre mieux », suivi d’une émoticône de coeur.

Véronique Barbe gérait à domicile la garderie Les petites guernouilles. Dans une annonce publiée sur le web, elle disait avoir ouvert une garderie après avoir acquis de l’expérience comme mère de quatre enfants. « Comme je dois me faire à l’idée que 4 enfants, c’est suffisant, j’ai décidé de me gâter avec VOS enfants ! », écrivait-elle.

« Accordez-moi le privilège de passer mes journées avec le petit soleil de votre vie, et soyez assurés qu’avec moi votre enfant sera heureux comme un poisson dans l’eau… ou bien comme une « guernouille » dans sa mare ! », pouvait-on lire.

Voisins sous le choc

Dans le quartier où le drame s’est joué, près du parc Binette et de l’école secondaire des Patriotes, plusieurs citoyens sous le choc se sont rassemblés devant le périmètre érigé par les policiers.

Mathis Vincent est allé à l’école avec un des fils de Véronique Barbe. Il voyait souvent la famille. « Ça m’étonne. Surtout ici où c’est très tranquille. » Même s’il ne lui parlait pas souvent, la mort de la femme lui fait mal. « Elle avait trois enfants. Il l’a tuée puis il est parti », a-t-il laissé tomber.

Valérie Millette, une étudiante qui habite tout près et qui a aussi fréquenté l’école avec un des fils de Mme Barbe, était très surprise. « J’étais au travail et en rentrant, j’ai vu les policiers qui étaient là et j’ai appris la nouvelle. Pour nous, c’est très surprenant parce que le quartier est très paisible. Mais ce sont des problèmes conjugaux qui arrivent », dit-elle.

La Sûreté du Québec doit faire le point ce matin sur cette affaire.

Paru dans la Presse

crédits photo : PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE