La violence envers les femmes 26 ans après Polytechnique

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«En cette Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes, en plus de commémorer les 14 victimes de Polytechnique, nous soulignons les luttes et la résilience des femmes autochtones, a lancé d’entrée de jeu Mélanie Sarazin, présidente de la Fédération des femmes du Québec. Elles sont ciblées et victimes de violence en tant que femmes, mais aussi en tant qu’Autochtones. Lorsqu’elles dénoncent des abus, comme dans les cas d’agressions par des policiers à Val-d’Or, leur parole est mise en doute.»

Johnny Wylde, dont la fille Sindy Ruperthouse a disparu il y a 18 mois, se souvient d’avoir suivi les reportages télévisés sur la tuerie de Polytechnique, le 6 décembre 1989. Jeannine Raphaël, dont la grande soeur Gilberte a été assassinée, se le rappelle aussi. Ni l’un ni l’autre n’aurait un jour pensé vivre ce genre d’événement de l’intérieur.

« Je trouvais ça très grave. J’étais dépassé. Je me disais : comment une personne a-t-elle pu faire ça ? » a relaté Johnny Wylde, sans cacher la détresse qui l’avait habité, au moment de cette tragédie qui a coûté la vie à 14 jeunes femmes. « C’est pareil avec ma fille : comment? », a-t-il encore demandé. « Je ne sais pas la rage qu’ils ont pour faire ça. Je ne comprends pas… »

Place du 6-Décembre-1989, à l’intersection du chemin de la Côte-des-Neiges et du chemin Queen Mary, à Montréal, où avait lieu un premier rassemblement en milieu de journée, l’Algonquin de Pikogan a rendu hommage à sa fille, dont il est sans nouvelles depuis le 1er octobre 2014. « Je suis ici pour soutenir les femmes, parce que notre fille, Sindy, a subi de la violence. Elle a su nous protéger, nous autres la famille, parce que celui qui la battait lui disait : “attention, si tu parles, je sais où sont tes parents”, a-t-il déclaré. Elle avait le droit de vivre. Et c’est pareil pour toutes les femmes. Elles ont le droit de vivre. »

Johnny Wylde et Jeannine Raphaël — une Innue de Mashteuiatsh — sont ravis de la collaboration qu’ils ont entamée avec les allochtones dans l’espoir de mettre fin à la violence faite aux femmes.

« Je me sens bien dans cette alliance qui est en train de se créer. C’est sûr que c’est tard un peu, mais c’est là que ça se passe. Il faut foncer dans le tas », a lancé Jeannine Raphaël. On n’est pas là pour faire la guerre, on est là pour chercher de l’aide, comme tout le monde. »

Reconnaissance

Le Parlement canadien a mis deux ans, après la tuerie de Polytechnique, pour mettre sur pied la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes. Si une enquête nationale sur les femmes autochtones disparues et assassinées est bel et bien lancée, comme l’a promis le premier ministre Justin Trudeau, alors le Canada aura attendu plus de trente ans avant de s’intéresser au sort de ces femmes.

« Ça a été très très long », a reconnu Viviane Michel, de Femmes autochtones du Québec. On peut y voir l’ignorance des Premières Nations : ce n’est pas important d’être autochtone, et cette problématique-là ne l’est pas non plus. »

Ce qui l’encourage à lutter, a-t-elle ajouté, c’est notamment cette alliance avec les groupes de femmes, de même que l’arrivée d’un nouveau gouvernement fédéral dans lequel de grands espoirs sont fondés. « On peut montrer à la société toutes les injustices et les inégalités qui existent chez nous, et ce sera important d’entendre les familles », a-t-elle dit à propos de l’éventuelle mise sur pied d’une enquête.

Plus tard en fin de journée, le premier ministre Justin Trudeau, entouré de plusieurs ministres québécois, s’est joint aux familles des victimes du massacre de l’École polytechnique pour une minute de silence chargée en émotion, sur la terrasse du belvédère du Mont-Royal.

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