Agressions sexuelles: Québec pressé de mieux protéger les enfants

agressions_sexuelles

« Il y a une grande banalisation qui existe dans les écoles. Les questions de harcèlement, de sexisme ordinaire, d’attouchements, surtout du côté des écoles primaires, ne sont pas prises au sérieux », a déploré Lilia Goldfrab, directrice des programmes du Y des femmes.

Jeudi, une coalition d’organismes a pressé le gouvernement du Québec d’agir, puisqu’à l’heure actuelle il n’y a rien qui oblige les établissements scolaires primaires et secondaires à se doter d’un protocole pour contrer les violences sexuelles. Du soutien financier est aussi demandé, puisqu’il est nécessaire non seulement de former les professeurs, mais aussi de compter sur des spécialistes.

Cette coalition a été créée après qu’un groupe d’adolescentes, âgées de 12 à 17 ans, a dénoncé les agressions subies à l’école.

Le Devoir rapportait le 30 mars que certaines ont même livré des témoignages troublants lors d’une séance des commissaires de la Commission scolaire de Montréal (CSDM). D’ailleurs, la CSDM a adopté mercredi une résolution demandant à Québec d’étendre sa stratégie pour prévenir et contrer les violences sexuelles au réseau des commissions scolaires du Québec.

Si ce sont des adultes qui font cette sortie, c’est parce que les intervenantes veulent éviter que ces jeunes subissent la pression d’une dénonciation publique.

Actuellement, a rappelé le groupe, les cas liés à des violences sexuelles sont — lorsque dénoncés — traités selon le protocole contre l’intimidation et la violence.

« Il faut faire la différence. De l’intimidation, ce n’est pas la même chose qu’un attouchement, que du sexting ou qu’un viol », a insisté Mme Martinak. « Ce n’est pas facile de dénoncer des cas d’agressions sexuelles et ça l’est encore moins lorsqu’on est adolescent. »

Les organismes estiment aussi que Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel, adoptée récemment par Québec, ne doit pas se limiter aux établissements d’enseignement supérieur.

De jeunes victimes

D’après des données du ministère de la Sécurité publique, 66 % des victimes d’agression sexuelle ont moins de 18 ans, rappelle le regroupement. Quant aux agresseurs, 20 % sont mineurs. Dans une très grande majorité de cas — 85,6 % —, les victimes mineures connaissent leur assaillant.

L’intervenante a rappelé que les agressions prennent plusieurs formes qu’il est parfois difficile de détecter. Les réseaux sociaux ne facilitent pas la tâche, puisque le partage d’images en un clic peut faire basculer la vie d’un enfant.

« On est en 2018, on doit arrêter de banaliser ces gestes quotidiens de harcèlement qui peuvent commencer par des mots, des commentaires sexuels ou encore des caresses aux seins et aux fesses, qui peuvent parfois se finir en agression sexuelle et même en viol collectif », a fait valoir Mme Goldfrab.

Par ailleurs, plusieurs agressions se produisent à l’extérieur des murs scolaires, ont précisé les intervenantes. Cette semaine, la terrible histoire d’une adolescente de 13 ans, victime d’un viol collectif, a mis en lumière le phénomène de partage d’images. Selon le 98,5 FM, l’agression sexuelle en groupe a été filmée puis partagée sur les applications WhatsApp et Snapchat. Le viol collectif aurait eu lieu lors d’une fête privée dans un appartement de Montréal-Nord. Toujours selon le 98,5 FM, c’est le frère aîné de la victime qui aurait vu les images et reconnu sa soeur. Il aurait ensuite alerté leur père.

« Même si une agression ne se produit pas à l’école, elle a des répercussions au sein de l’établissement, notamment pour les traumatismes pour la victime, pour les rumeurs qui courent dans les cours d’école, les autres jeunes qui sont au courant, les témoins impuissants et déstabilisés », a souligné Mme Martinak, sans vouloir commenter de cas précis.

Mélanie Lemay, cofondatrice de Québec contre les violences sexuelles, a rappelé qu’une partie de la solution réside dans l’éducation sexuelle des jeunes.

« Il faut un protocole clair et uniforme dans toutes les écoles du Québec, qui rend justice aux victimes et qui assure la rééducation de l’agresseur puisque, effectivement, l’avenir de l’agresseur doit aussi faire partie de l’équation », a-t-elle souligné.

Sources : Le Devoir

photo : Valérian Mazataud Le Devoir